Une observation détaillée avec l'imageur canadien NIRISS révèle de la vapeur dans l'atmosphère d'une planète lointaine
Le télescope spatial James Webb a capté la signature distincte de l'eau et obtenu des preuves de nuages et de brume dans l'atmosphère d'une géante gazeuse chaude en orbite autour d'une étoile lointaine semblable au Soleil.
Cette observation qui révèle la présence de molécules de gaz précises basées sur d'infimes diminutions de la luminosité de couleurs précises de la lumière est la plus détaillée de ce type à ce jour. Elle démontre la capacité inédite de Webb à analyser l'atmosphère de planètes à des centaines d'années-lumière.
Le télescope spatial Hubble, depuis une vingtaine d'années, a analysé l'atmosphère de plusieurs exoplanètes, la première détection claire de l'eau remontant à . Cependant, l'observation très détaillée toute récente de Webb constitue un pas de géant dans la quête visant à caractériser des planètes potentiellement habitables autres que la Terre.
Plus de 5000 exoplanètes ont été confirmées dans la Voie lactée : WASP-96 b est l'une d'entre elles. Située à environ 1150 années-lumière dans la constellation du Phénix, dans le ciel austral, cette géante gazeuse n'a pas d'équivalent direct dans le Système solaire. D'une masse inférieure à la moitié de celle de Jupiter et d'un diamètre 1,2 fois supérieur, WASP-96 b est beaucoup moins dense que n'importe quelle planète en orbite autour du Soleil. Elle est aussi beaucoup plus chaude : sa température s'élève à plus de 1000 °F (538 °C). WASP-96 b suit une orbite très proche de son étoile semblable au Soleil, équivalant à un neuvième à peine de la distance entre Mercure et le Soleil. Il lui faut 3,5 jours terrestres pour faire une révolution.
Grande taille, courte période orbitale, atmosphère peu dense et absence de lumière provenant d'objets à proximité, voilà ce qui fait de WASP-96 b une cible idéale pour l'observation de son atmosphère.
Le , l'imageur et spectrographe sans fente dans le proche infrarouge (NIRISS) de Webb a mesuré la lumière du système WASP-96 pendant 6,4 heures pendant que la planète passait devant l'étoile. Le résultat est une courbe de lumière montrant la diminution globale de la luminosité de l'étoile pendant le transit et un spectre de transmission révélant le changement de luminosité de longueurs d'onde particulières de l'infrarouge entre 0,6 et 2,8 micromètres.
Alors que la courbe de lumière confirme des propriétés de la planète (existence, taille et orbite) déjà déterminées à partir d'autres observations, le spectre de transmission, quant à lui, révèle des détails de l'atmosphère jusqu'alors jamais observés : la signature distincte de l'eau, des signes de la présence de brume et la preuve de la présence de nuages, ces derniers ayant été considérés comme inexistants antérieurement.
On obtient un spectre de transmission en comparant la lumière stellaire filtrée par l'atmosphère d'une planète qui passe devant son étoile à celle non filtrée détectée quand la planète est à côté de son étoile. Les chercheurs sont capables de détecter les principaux gaz dans l'atmosphère d'une planète et d'en mesurer la quantité en se basant sur le modèle d'absorption – l'emplacement et la hauteur des pics sur le graphique. Tout comme chacun d'entre nous a des empreintes digitales et une séquence d'ADN distinctes, les atomes et les molécules absorbent des longueurs d'onde bien particulières.
Le spectre de WASP-96 b capté par le NIRISS n'est pas seulement le spectre de transmission dans le proche infrarouge le plus détaillé jamais obtenu de l'atmosphère d'une exoplanète, mais il couvre aussi beaucoup de longueurs d'onde, y compris la lumière rouge visible et une partie du spectre auparavant inaccessible avec d'autres télescopes (longueurs d'onde supérieures à 1,6 micromètre). Cette partie du spectre est particulièrement pertinente pour la détection de l'eau et d'autres molécules clés, comme l'oxygène, le méthane et le dioxyde de carbone. Celles-ci ne sont pas évidentes d'emblée dans le spectre WASP-96 b, mais elles devraient être détectables dans celui d'autres exoplanètes dont l'observation est prévue avec Webb.
Les chercheurs pourront utiliser le spectre pour mesurer la quantité de vapeur d'eau dans l'atmosphère, limiter divers éléments abondants comme le carbone et l'oxygène et estimer avec justesse la température de l'atmosphère. Ils pourront ensuite se servir de ces renseignements pour tirer des conclusions sur la constitution de la planète dans son ensemble ainsi que sur la manière, le moment et l'endroit où elle s'est formée. La ligne bleue sur le graphique est une courbe d'ajustement qui tient compte des données, des propriétés connues de WASP-96 b et de son étoile (p. ex. la taille, la masse, la température) et des caractéristiques supposées de l'atmosphère.
La précision et la clarté exceptionnelles de ces mesures sont possibles grâce à la conception de pointe de Webb. Son miroir plaqué or de 270 pi² (25 m²) capte efficacement le rayonnement infrarouge. Ses spectrographes de précision diffractent la lumière en arcs-en-ciel de milliers de couleurs infrarouges. En outre, ses détecteurs infrarouges sensibles mesurent des différences de luminosité extrêmement ténues. Le NIRISS est capable de détecter des différences de couleur d'environ un millième de micromètre seulement (la différence entre le vert et le jaune est d'environ 50 millièmes de micromètre) et des écarts de luminosité entre ces couleurs de quelques centaines de parties par million.
De plus, l'extrême stabilité de Webb et son emplacement orbital autour du point de Lagrange L2, loin (environ 1 500 000 km) des effets perturbateurs de l'atmosphère terrestre, permettent des observations ininterrompues et des données nettes qui peuvent être analysées relativement rapidement.
Le spectre extraordinairement détaillé – réalisé par l'analyse simultanée de 280 spectres distincts captés au cours de l'observation – ne donne qu'une petite idée de ce que Webb nous réserve pour la recherche sur les exoplanètes. Dans l'année qui vient, les chercheurs feront appel à la spectroscopie pour analyser la surface et l'atmosphère de plusieurs dizaines d'exoplanètes, des petites planètes rocheuses aux géantes gazeuses et aux géantes de glace. Près du quart du temps d'observation du Cycle 1 avec Webb est consacré à l'étude des exoplanètes et de la matière qui les compose.
Cette observation réalisée avec le NIRISS démontre que le télescope Webb possède la puissance nécessaire pour caractériser l'atmosphère d'exoplanètes, y compris celle de planètes potentiellement habitables, à un niveau de détail inégalé.
Le télescope spatial James Webb est le plus grand observatoire spatial du monde. Il permettra de résoudre des mystères du Système solaire, d'observer des mondes lointains autour d'autres étoiles et de sonder les structures et les origines mystérieuses de l'Univers et de la place que nous y occupons. Le télescope Webb est une mission internationale de la NASA menée en collaboration avec ses partenaires, l'Agence spatiale européenne et l'Agence spatiale canadienne.
Le NIRISS a été fourni par l'Agence spatiale canadienne. L'instrument a été conçu et construit par Honeywell en collaboration avec l'Université de Montréal et le Conseil national de recherches Canada.
Texte abrégé reproduit avec l'aimable autorisation de la NASA.
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